Vendredi (18/11/05)
Passage de la trappe – Dimanche 14 novembre 2005
En effet, il existe différents « carrés » au sein d’un bâtiment. Il s’agit du lieu de repas et de vie de l’équipage en fonction de son appartenance à une catégorie de personnel. Les quartier maîtres et matelots, en tant qu’équipage, se retrouvent à la cafétéria équipage, tandis que les second maîtres et maîtres sont au carré officiers mariniers et les premiers maîtres, maîtres principaux et majors au carré officiers mariniers supérieurs. Il en est de même pour les officiers qui en fonction de la taille du bâtiment et de leur nombre peuvent se voir répartis en deux carrés, l’un pour les officiers subalternes, l’autre pour les officiers supérieurs. Sans oublier le carré commandant, voire celui de l’amiral, lorsque, comme sur la Marne, l’un d’entre eux est embarqué. Lors du changement de catégorie par un membre, une tradition veut que celui-ci quitte les uns pour être accueillis par les autres. Celui-ci passe alors par la trappe de ventilation située sur la porte du carré, d’où le nom de cette « épreuve » ! C’est donc ce qui m’est arrivée, ce dimanche 14 novembre 2005, et je peux dire qu’à peine plus d’un mois après la ligne, l’ingestion de mixture reste difficile…Mais, je ne vais pas trop me plaindre car ils ont été assez gentils avec moi ! Cela reste de toutes façons, bon enfant à chaque fois !
J’étais donc conviée une dernière fois chez les OM (lire officiers mariniers) en bleu de chauffe. On m’a, tout d’abord, offert un premier cocktail buvable, puisqu’il s’agissait de Schwepps où deux sachets de thé avaient plus ou moins infusés. Par la suite, on m’a assise dans une poubelle et je dirais que les hostilités ont pu commencer ! J’ai dû goûter un grand verre qui de loin ressemblait à un chocolat mousseux. Il s’agissait plutôt d’un mélange de chantilly salée/poivrée, de cacao, de grains de raisin et de sauce chinoise. Je n’ai pas pu boire tout, c’était trop infâme… On s’est donc occupé de mes cheveux sur lequel un shampoing avec un pot de miel a été réalisé, par la suite, des œufs, de la mayonnaise et de la farine y ont été ajoutés, mélangés et malaxés… Un bol m’est ensuite parvenu, c’était le cuistot qui me l’avait spécialement préparé. J’ai donc la composition quasi exacte, sans connaître les proportions : cacao en poudre, raviolis mixés, gruyère râpé, raisin, sauce nuoc man à foison. Étant donné que cela rappelait sérieusement les odeurs connues lors de la ligne, c’était plutôt difficile à avaler, du coup, je me suis vue renversée plus de la moitié de la mixture sur moi ! Avant des m’envoyer chez les OMS (lire officiers mariniers supérieurs), des petites fioles d’Éosine ont été ouvertes et glissées par les jambes et bras du bleu, de quoi bien frotter en perspective… On m’a ensuite lié les mains avec les pieds et on m’a portée dans ma poubelle, jusque devant la porte du carré OMS, me laissant là avec une pancarte « J’emm…. les OMS, surtout le PM BOUL… ». Je suis donc sortie tant bien que mal de mon fauteuil et ai frappé à la porte des OMS, sollicitant le président pour avoir l’autorisation d’entrer. Je me suis faufilée par une trappe (cette fois, celle du passe plat) et ai eu le droit à un pot de bienvenue. Encore un grand verre m’attendait, rempli de thé à la vanille, de sauce soja et sauce au poisson, beaucoup de sel de céleri et je ne sais quoi d’autre ! J’ai été obligée de tout boire cette fois-ci ! Je m’attendais à devoir chanter le règlement du carré ou encore le menu, mais finalement on m’a autorisée à aller prendre une douche. Hormis, les tâches rouges sur la peau, j’ai pu récupérer sans trop de mal mes cheveux, ce pour quoi que je craignais tout de même le plus.
Étant la plus jeune du carré, je me retrouve ainsi « Bidou ». Je suis donc responsable, en collaboration avec le président, de surveiller si les gens arrivent à l’heure, ne jettent pas d’aliments lors des repas et plein d’autres petites subtilités du genre. Auquel cas, je peux noter sur un cahier, ce qu’on appelle des TG (tournées générales) nominativement. Je suis aussi tenue de présenter chaque nouveau membre du carré et souhaiter les anniversaires de chacun, au risque de prendre moi-même une TG si ce n’est pas fait !
Voici quelques photos de ce passage de trappe (en tous cas, on pourra dire que j’ai optimisé ma campagne…)
en attente car ce n’est pas moi qui les ai prises, forcément…
Ecrit par Behess, à 08:11 dans la rubrique "La vie à bord".
Mardi (11/10/05)
PASSAGE DE LA LIGNE - 10,11 et 12 octobre 2005
Début des festivités du passage de l'équateur...
En tant que néophyte, je ramasse et vous raconterai tout ça à l'issue!
Tout d’abord, un peu d’histoire :
L’Equateur, ligne imaginaire qui partage le globe en deux hémisphères situés par définition au degré 0 de Latitude. On estime sa longueur à plus de 40 000 Km. Pour les marins, le franchissement de « la ligne », comme ils l’appellent, est sujet à une tradition de baptême qui remonterait aux vikings. L’instauration du rituel de passage chez les marins date de la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb en 1492, et du passage du Cap de Bonne Espérance par Vasco De Gama. C’est en effet eux qui ouvrirent la voie aux navigateurs du monde entier vers les voyages au « Levant » (Indes Orientales), et au « Couchant » (Indes Occidentales), avec un passage obligé par l’Equateur… C’est donc réellement depuis le siècle des Lumières que les marins s’adonnent traditionnellement à un tel rite. Alors en quoi consiste-t-il ? Il s’agit dans un premier temps de renverser l’ordre social à bord. Le passage de l’équateur signifiant pour les marins le basculement vers un mode inconnu, le bateau prenait alors des allures de carnaval, où les matelots de tout rangs se déguisaient de façon burlesque, complètement peints de noir, et se livraient à des débordements chaotiques. Puis, prenait place une parodie de jugement menée par les anciens (ceux qui ont déjà fait la traversée) de façon à initier les jeunes matelots. A cette occasion, le bateau se transformait en scène de théâtre où Neptune en Dieu tout-puissant accompagné de diables, diablotins et autres tritons prononçait la sentence réservée aux novices. Troisième étape : l’immersion totale dans un réservoir d’eau ; une façon de proclamer la purification du marin, et d’évaluer sa capacité à dompter cet élément. Avant d’être plongés dans l’eau, les matelots étaient barbouillés de peinture et de restes de nourriture peu appétissants… Ces épreuves à l’allure de bizutage convertissaient définitivement les jeunes matelots en vieux loups de mer. Ce rite très exubérant s’explique à l’époque par l’angoisse éprouvée par des marins voguant à la découverte de nouveaux horizons. Il faut dire qu’à l’approche de l’Equateur, l’ambiance est plutôt infernale : des calmes plats aux chaleurs étouffantes, ponctués de grains violents et de pluies diluviennes qui souvent faisaient chavirer les navires… Tout cela portait à croire que l’on s’approchait de l’enfer ! Aujourd’hui, les conditions de navigation sont les mêmes, mais les craintes ont disparues. Toutefois, la tradition est bien là, et cette étape reste pour les marins une fête incontournable, sorte d’antidote à l’ennui et à la pression d’un long voyage en mer…
Des infos complémentaires sur http://tremblezneophytes.free.fr/
Lundi 10 :
Nous reprenons la mer et les hostilités ou festivités, je ne sais trop, commencent… Dès le début de matinée, les néophytes (ceux qui n’ont jamais passé la ligne) sont attrapés par les dignitaires et se font écrire au marqueur, indélébile de préférence, un N sur le front. Voire NP pour néophyte puant ou encore avec un R pour récalcitrant. Pour ma part, ce ne sera qu’en fin de matinée que je me retrouverai avec NR écrit sur le visage ! Lors du repas et donc de mon arrivée au carré, il me faut, comme tous les autres néo, me mettre à 4 pattes et baisser les yeux. Nous sommes conduits jusqu’au bar pour y boire un apéro très spécial : une mixture peu agréable à base d’huile d’olive, de vinaigre, de sauce « nuoc man », de clous de girofles et bien d’autres ingrédients que je n’ai pu déterminer.
Avant cela, on m’a fait avaler une petite plaquette de beurre, histoire de « bien faire passer tout ça » ! Comme je ne grimace pas à la déglutition du breuvage spécial néo, j’ai le droit à un deuxième verre : trop sympa !
Nous sommes parqués au sol dans un coin du carré. Comme le travail m’attend, je quitte le carré sans manger. Mes camarades auront le droit à un saladier pour tous avec tout le menu mélangé et ni couvert, ni assiette. Je suis laissée tranquille pour l’après-midi alors que certains sont conviés à faire les pom-pom girls pendant un RAM. Pour le dîner, même rituel, un apéro un peu plus gras que celui de midi nous est servi en guise de bienvenue. Nous attendons alors toujours au sol que l’on daigne nous donner à manger. Ce sera assis par terre et avec les mains que nous mangerons d’abord des betteraves (un saladier pour tous), puis du riz avec du poisson. Pendant que les dignitaires mangent, ceux-ci, ont besoin d’être divertis et demandent alors un néo pour faire la poubelle, ou encore l’horloge. Pour ma part, je me retrouverai à faire le doux cui-cui des oiseaux pendant que quelqu’un d’autre faisait la cigale…En sortant, je suis invitée en machine pour subir de nouvelles « épreuves ». On me met de la graisse sur le visage, je demande alors à ce que l’on me dessine une fleur sur la joue, ma requête est exaucée. Une sorte de planche avec trou pour la tête et les poignées m’est enfilée et on me demande de danser. Par la suite, je repasse les chiffons des mécanos en chantant, tri des écrous (mais je préfère écrire des slogans avec).
J’ai aussi le droit à une dernière dose de mixture pour la journée. Pour finir, je descend au niveau des moteurs, où j’enfile une veste de pompier, un harnais et reste suspendue « à battre des ailes » quelques instants dans une atmosphère à plus de 45°C.
Je suis alors libérée, on me laisse aller prendre une douche et finalement, je passe une nuit entière et correcte.
Ma 11 :
La matinée reste calme car nous avons d’autres activités à côté. Pour le déjeuner, nous sommes toujours attendus au carré, avec cette fois un verre de mixture et un petit encas (pain bizarre+mayo+ ??). Toujours assis au sol, des croque-monsieurs comprenant tout le repas dedans seront servis : pain grillé, jambon, rôti + chou fleur et fraises + jus de mixture. L’odeur est assez répulsive mais une fois le croque en main et en décomposant le repas, c’est mangeable : surtout quand on commence à avoir faim…Je passe le début d’après-midi dans une niche à faire le chien.
En fin d’après-midi, il nous faut alors chercher notre convocation pour le lendemain. Nous revêtons alors la tenue 0bis, c'est-à-dire short, Tshirt, couvre-chef, une chaussette blanche, une chaussette noire, des sandalettes, une cravate (pour les filles, le bleu de travail est requis) . Tous les néo se rassemblent à 4 pattes et se suivent pour aller chercher ce fameux bout de papier…au fond d’une poubelle remplie de nourriture peu appétissante.
Le soir, la cérémonie du repas est toujours à peu près identique, nous aurons le droit à une assiette individuelle (toujours pas de couverts) de pâtes. Met appréciable en ces jours ! Ce soir, un « bal des putes » est organisé, il s’agit là, pour le personnel masculin de se déguiser en filles et de subir un vote du jury, dont le commandant fait d’ailleurs parti. Pour les filles, nous nous sommes adaptées, certaines se sont déguisées en mec. Moi, je me suis déguisée en sorcière, il faut souvent faire avec les moyens du bord… Pour la nuit, certains se cacheront. Concernant mon poste, nous serons réveillés une première fois par des bruits de pieds au plafond et la seconde par une irruption de dignitaires avec pistolets à eau+vinaigre.
Me 12 :
C’est le grand jour ! Nous nous habillons comme la veille pour la convocation, et sommes amenés après un passage auprès des ateliers médicaux, du barbier et du coiffeur, sur la plage avant. On nous arrose régulièrement avec les lances à incendie car le soleil tape. Les différents acteurs du comité de la ligne nous tiennent un discours : nous rencontrons, le commandant (pas l’officiel du bâtiment cette fois), Neptune et son épouse Amphitrite, Monseigneur Pompilius, le juge et l’avocat général, l’astronome et d’autres personnages tels que les gendarmes équatoriaux et la tribu de sauvages « OULA OULA CA FAIT BOBO ». Nous attendons sous le soleil de plomb et l’on nous sert notre gratin dauphinois avec la viande et les fraises dans un même grand plat de collectivité ! Quasi affamés, certains y goûteront malgré l’odeur assez répulsive. Je grignoterai moi-même un peu. Nous sommes alors emmenés sur la plage arrière puis par groupe de 5 sur la plate-forme hélico pour subir notre sentence. Je serai condamnée à la triple avec séchage entre chaque plongeon mais l’avocat général demandera une quadruple avec séchage final. Voilà le résultat de mon parcours, après embrassade des pieds d’Amphitrite, bénédiction, graisseurs, passage à la piscine entre les mains des sauvages puis le boulanger :
Nous pouvons alors nous débarbouiller, mais j’avoue qu’enlever toute cette graisse de moteur, les œufs et la farine n’a pas été chose aisée… Mais en tous cas, cela restera un très bon souvenir ! (certains diront que ce n'est plus ce que c'était..., qu'on n'a pas assez "ramassé"! Les bizutages étant maintenant plus ou moins réglementés, on fait avec son temps. En tous cas, personne n'a été forcé à quoi que ce soit!)
Di 16 :
Remise de nos diplômes: à conserver précieusement!! et à présenter à chaque passage de ligne si on ne veut pas la repasser!!
Maintenant, je suis chevalier ou chevalière (je ne sais pas si cela se dit). Je n'ai donc pas le droit de faire passer la ligne à quelqu'un, je dois rester en simple observateur, je dois attendre un prochain passage pour être alors dignitaire. De nos jours, les dignitaires n'étant pas assez nombreux, il arrive que des chevaliers participent aux festivités de manières actives.
Ecrit par Behess, à 08:33 dans la rubrique "La vie à bord" - Mise à jour : Vendredi 18 Novembre 2005, 08:20.
Jeudi (18/08/05)
Prise de commandement - 12 Août 2005
Vendredi 12 Août 2005 : Prise de commandement
Ce jour là, nous avons changé de commandant. Et pour cela, une cérémonie est organisée. Comme, nous sommes à Cape Town et que c’est l’hiver, la tenue de sortie en vigueur est la tenue 22, c’est à dire le pantalon bleu (en laine qui pique) et la veste assortie !
Comme, il fallait s’occuper de la sono et que l’officier en second voulait des « spécialistes »…, je n’ai pas pu aller sur les rangs (donc pas de photos de moi en uniforme, mais promis, j’essaierai de faire la prochaine cérémonie et d’avoir des photos ; mais en blanc cette fois car ce sera à la Réunion!). Mon nouveau commandant s’appelle donc le Capitaine de Frégate Patrick Augier. Je l’ai déjà rencontré dans son bureau car il souhaite que je lui change son ordinateur !
Pour vous montrer que j’étais présente, je vous fais parvenir une petite photo…
Ecrit par Behess, à 21:58 dans la rubrique "La vie à bord".
Jeudi (11/08/05)
Mon bureau
Voilà, je viens ici tous les matins (ou presque...) pour administrer le réseau informatique. Il y a aussi plein de matériel téléphonique, d'interphones et de haut-parleurs pour la maintenance"trafi".
Je travaille avec deux second-maîtres qui ont déjà un peu d'expérience. Du coup, en équipe, nous nous complétons.
Mais en réalité, je suis rarement dans ce local car je suis souvent appelée à droite et à gauche pour des interventions et aider les utilisateurs.
Il y a aussi un autre local dans lequel il m'arrive de travailler, mais je n'ai pas le droit d'y prendre des photos...il s'appelle le PC TELEC (c'est là où l'on traite et exploite toutes les télécommunications)
Ecrit par Behess, à 22:00 dans la rubrique "La vie à bord".
Mercredi (10/08/05)
Là où je dors
Voilà quelques photos pour vous montrer à quoi ressemble là où je vis en dehors des périodes de travail. Et tout d'abord un plan, histoire de vous repérer:
Ecrit par Behess, à 22:07 dans la rubrique "La vie à bord".